Du 4 au 7 août, la Ligue ouvrière d’Action catholique (LOAC) a accueilli un séminaire régional océan Indien avec pour thème « La place de l’humain dans la création », au Foyer Fiat, Petite-Rivière. Maurice, Rodrigues, Madagascar et La Réunion y participaient. Christine Isturiz, co-présidente du Mouvement mondial des travailleurs chrétiens (MMTC) et Fabrice Laldy-Maquiha, conseiller régional de l’océan Indien, reviennent sur le besoin d’un travail décent et les réalités du monde du travail dans cette région du monde.
Répondre à un défi
« Le principal défi mondial reste celui d’un travail décent. Il n’est pas simplement question d’emploi, mais de travail qui nourrit l’homme dans toutes ses dimensions : qui lui permet de subvenir aux besoins de sa famille, d’assurer son développement personnel et de vivre avec sa dignité d’être humain », avance Christine Isturiz.
Cette dernière soutient que la LOAC a pour mission de faire cette forme « d’éducation populaire » auprès des travailleurs. Avec la méthode, Voir, Juger et Agir, la co-présidente explique que les travailleurs ont pour mission de prendre conscience du monde qui les entoure et de réagir à la lumière de l’Évangile. Notre interlocutrice ajoute que les actions des groupes de la LOAC peuvent prendre des formes collectives ou individuelles, afin de répondre à un défi ou une réalité propre au pays. « Et chaque mouvement est autonome et sait, dans son pays, quels sont les défis principaux à relever pour que chacun vive en humanité le plus possible », poursuit Christine Isturiz, en précisant que le MMTC est présent dans plus de cinquante pays.
Les réalités de l’océan Indien
Fabrice Laldy-Maquiha, conseiller régional de l’océan Indien, ajoute que bien que les réalités diffèrent dans les îles, il existe des points de convergences dans le débat. Notamment avec le flux migratoire entre les îles pour des raisons économiques. Il est conscient que les migrants sont toujours en mouvement afin de trouver du travail dans ces pays. « Ce que l’on constate, c’est qu’à Maurice par exemple, les conditions de travail des migrants sont parfois plus difficiles que celles des Mauriciens (...) Ces migrants n’ont alors pas le choix et acceptent ces conditions », explique notre interlocuteur. Le défi de la LOAC est d’intervenir auprès de ces personnes afin de leur faire prendre conscience de leurs droits et de lutter con- tre l’exploitation. Cette prise de conscience, Fabrice Laldy-Maquiha ajoute qu’elle ne doit pas s’arrêter qu’aux travailleurs concernés, mais s’étendre à la société. « C’est-à-dire qu’on peut être un citoyen lambda, mais on n’est pas au courant de ce qui se passe, des conditions de vie des migrants, etc. Donc, il faut attirer l’attention sur cette dimension comment éveiller la conscience, pour créer la solidarité », soutient notre interlocuteur.
Le patronat dans l’équation
« Qui fait la richesse du patron ? Un patron sans ouvriers est pauvre », lance d’emblée Christine Isturiz, en évoquant la relation entre les mouvements de travailleurs chrétiens et les employeurs. Cette dernière ajoute qu’ils ne se trouvent pas en opposition au patronat mais éveillent les consciences pour que les droits des travailleurs soient le plus respectés. « Par- ce que la loi du travail s’applique au pays, et donc à tous. De ce fait, ce n’est pas aller au- delà de la loi, c’est juste la faire respecter », avance notre interlocutrice. Et Fabrice Laldy-Maquiha de renchérir en rappelant que comme le travailleur, le patronat est aussi appelé à vivre à la lumière de l’Évangile. « Un patron chrétien devrait savoir qu’on est tous frères. Et ce que tu as fait à ton frère, c’est à moi que tu le fais, comme dans les Évangiles. Mais ils oublient un peu », confie ce dernier.
Il rappelle qu’avoir un employé heureux ne peut qu’être un aspect profitable pour la compagnie et le patronat peut en sortir gagnant. Mais notre interlocuteur ne cache pas que dans la réalité, certains patrons peuvent ne pas respecter les droits des travailleurs et leur demander de partir s’ils ne sont pas contents, notamment les travailleurs migrants.
LOAC = vivre la foi dans le monde
Un défi que veut relever le mouvement aujourd’hui, c'est son rajeunissement. Ce n’est pas évident de ramener les jeunes et de les faire réfléchir sur le monde du travail. « Parce qu’aujourd’hui, les jeunes sont accaparés par d’autres préoccupations (…) com- ment leur faire prendre conscience (…) qu’il faut aussi ouvrir les yeux sur ce qui passe autour d’eux et ne pas se laisser aveugler par la technologie et tout le reste ? Donc c’est aussi un défi pour nous de renouveler, d’élargir le mouvement et d’intéresser les jeunes », concède Fabrice Laldy-Maquiha. Ce dernier rappelle que c’est tout autant un devoir de chrétien de s’intéresser au monde qui nous entoure. À l’image du Christ, il soutient que c’est un devoir d’aller vers les plus vulnérables et les marginalisés de la société, dans le monde du travail plus précisément. « Il ne faut pas se dire qu’il y a ma vie d’un côté et ma foi de l’autre », conclut Fabrice Laldy-Maquiha.
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